« Une mère italienne vient d’accoucher d’un garçon. Comment fait-elle pour savoir quel métier son fils fera plus tard ?
- Je ne sais pas. Ai-je répondu.
- C’est très simple : elle le lance contre un mur. S’il pleure, il sera chanteur. S’il reste collé, il sera maçon. »
Vous pensez sans doute que
cette blague est xénophobe. A première vue, elle l’est en effet, mais seulement
pour ceux qui le sont eux-mêmes, car pour moi, elle exprime de
manière humoristique une part de vérité : que les Italiens en France se sont montrés à la fois
travailleurs et artistes. Je ne m'attarderai pas sur les enfants d’immigrés italiens
qui sont devenus d'illustres chanteurs (Serge Reggiani), comédiens (Fabrice Luchini), instituteurs, avocats, architectes,
préfets de la République Française (Cécile Pozzo di Borgo) ou ministre au Grand-Duché de Luxembourg (Mars di Bartolomeo) ou encore maire
de Volmerange-les-Mines (Raymond Locatelli), mais de leurs pères dont la plupart ont d’abord été
des ouvriers, de bons ouvriers du bâtiment en particulier. Beaucoup sont d’ailleurs
venus en France après la Première guerre Mondiale pour construire la ligne
Maginot. Et puis, bien sûr, il y a eu les mines et la sidérurgie.
A leur arrivée, ils ont
généralement été mal acceptés par la population locale. Je ne répète que ce que
j’ai entendu dire à propos de la façon dont cela s’est passé à
Volmerange : « A l’église, nous les femmes des « ritals », on n’avait
pas le droit de s’asseoir devant, on devait rester derrière les ''madames'' du
village. » M’a confié Lucia avec encore un soupçon d’amertume. « Les
Italiens ? Ils se battaient souvent, et ils sortaient facilement le
couteau. » Disait Marie-Louise avec encore un frisson de réprobation.
Les premiers arrivants ont
été logés dans les maisons construites pour eux par les entreprises qui les
employaient. Les familles ainsi parquées ensemble au lieu d’être disséminées
parmi les autochtones, il était inévitable que les cités ouvrières devinssent un
peu des ghettos, enclaves étrangères sur le sol français.
Lorsque je suis
arrivé à Volmerange, en 1962, il existait encore une rivalité assez forte entre
les enfants du « Village » et ceux de la « Colonie »
(entendez ceux qui venaient coloniser la France !), qui se traduisait en
batailles rangées à coup de bâtons et de pierres et qui s’est heureusement éteinte rapidement
avec la génération des enfants de la télé et du jeu vidéo.
Autre exemple : en
1989, alors que nous étions en campagne électorale, M. Brun, qui était peut-être
italien, m’avait interpellé ainsi : « Qu’est-ce que vous allez faire
pour nous, hein ? Rien. Votre municipalité, c’est toujours des gens du
village qui n’en ont rien à faire de nous, ici, à la « colo »; on
sera toujours des parias. » (Depuis, nous lui avons démontré qu’il avait
tort !) Même Raymond Locatelli était considéré par certains Italiens un
peu comme un traître parce qu’il était passé du côté des bourgeois en partant habiter
au village.
De leur côté, beaucoup de vieux villageois avaient encore des préjugés à
l’égard des Italiens.
Voilà pour les obstacles à la
bonne entente et à l’intégration.
Mais si on s’était arrêté là, l’immigration
italienne aurait fini, comme l’africaine aujourd’hui, par poser un grave problème
de société. Or, la population d’origine italienne, malgré les difficultés
originelles, a fini par se laisser absorber et devenir invisible dans la
société française. Ainsi, les dernières associations d’Italiens, qui furent longtemps
très présentes et prospères, vont-elles peut-être bientôt disparaître. (Mais pas notre jumelage !)
Comment cela s’est-il fait ?
Le plus simplement du monde, je crois, lorsque les immigrants italiens eurent
compris que leurs descendants feraient leur vie en France et qu’eux-mêmes ne
retourneraient pas au pays. Un signe qui ne trompe pas : c’est qu’ils ont
cessé de parler italien à leurs enfants, pensant que ce serait un handicap pour
eux ; certains ont même abandonné la lettre finale de leur nom afin qu’il
sonne français.
Il faut reconnaître qu’il y
avait tout de même des facteurs propres à favoriser l’intégration : la
religion était la même et d’église, il n’y en avait qu’une dans chaque village ; alors on se rencontrait tout de même et on a fini par célébrer des mariages. Et puis les Italiens ne sont pas venus en France qu’avec la seule force de
leurs bras. Etant très politisés, ils ont d'abord joué un rôle important dans
les luttes syndicales, aux côtés de tous les ouvriers, souvent en tant que leaders. Et il faut savoir que dans beaucoup de
villes, ils furent à l’origine de la création de chorales, de fanfares, d’orchestres
d’harmonie et d’équipes de football.
Aujourd’hui, plus personne en
France ne songe à faire des blagues xénophobes sur les Italiens. Nous avons maintenant
d’autres immigrés dont certains français (pas forcément « de souche »
eux-mêmes !) craignent qu’ils soient en train de nous coloniser.
Mais
cette affaire-là est bien plus sérieuse parce que, pour l’instant, on n’en voit
pas la solution.
Richard Hormain
N.B. Pour en apprendre davantage
sur l’émigration italienne, lisez ceci :
http://cahiersdugretha.u-bordeaux4.fr/2010/2010-13.pdf
LA DIFFICOLTA' DI ESSERE UN IMMIGRATO:
Parlando di italiani, qualcuno mi sottopose, circa 25 anni fa, il
seguente indovinello: «una madre italiana ha dato alla luce un bambino. Come
farà questa a sapere quale mestiere farà suo figlio?» «Non lo so» risposi. «È molto
semplice. Lo lancia contro il muro. Se piange farà il cantante, se si attacca
il muratore».
Penserete senza dubbio che questa barzelletta sia xenofoba. A prima
vista,in effetti, lo è, ma per me si esprime in modo umoristico qualcosa che in
parte è vero: gli italiani in Francia si sono mostrati sia lavoratori che
artisti. Non mi soffermo sui figli di immigrati che sono diventati famosi cantanti
(Serge Reggiani), attori (Fabrice Luchini), insegnanti, avvocati, architetti,
prefetti della Repubblica Francese (Cécile Pozzo di Borgo), ministro del
Granducato di Lussemburgo (Mars di Bartolomeo) o, ancora, sindaco di
Volmeranges (Raymond Locatelli), ma i padri della maggior parte di essi sono
stati i primi operai, bravi operai edili in particolare. Molti sono arrivati in
Francia dopo la prima Guerra Mondiale per costruire la Linea Maginot. Poi
ovviamente c’erano le miniere e la siderurgia. Al loro arrivo, essi erano
generalmente poco accettati dalla popolazione locale. Io non vi ripeto altro
che quello che ho sentito dire a proposito del modo in cui questo è stato
vissuto a Volmeranges: «In chiesa, noi donne “ritals” non avevamo il diritto di
sederci davanti, dovevamo rimanere dietro la “madame” del paese» mi ha
confessato Lucia con ancora un po’ di amarezza. «Gli italiani? Litigavano
spesso e tiravano fuori il coltello facilmente» mi ha detto Marie-Louise con un
brivido di disapprovazione.
I primi che arrivarono, alloggiarono in abitazioni costruite per loro
dai padroni delle fabbriche in cui lavoravano. Le famiglie erano ammassate
insieme e invece di confondersi con gli autoctoni fu inevitabile che le case degli
operai divennero un piccolo ghetto, enclavi straniere sul suolo francese.
Quando sono arrivato a Volmeranges, nel 1962, c’era ancora una forte rivalità
tra i bambini del “villaggio“ e quelli della “colonia” (ossia coloro che sono
venuti a colonizzare la Francia!), rivalità che ha portato a battaglie campali condotte
a colpi di bastone e pietre che si è, fortunatamente, dissolta con la nuova generazione
della tv e dei videogiochi. Un altro esempio: nel 1989, durante la campagna
elettorale, M. Brun, che probabilmente era italiano, mi apostrofò così: «Che
cosa farai per noi eh? Niente! Il vostro comune è sempre per la gente del
villaggio che non ha niente a che fare con noi, qui, alla “colonia”, saremo
sempre emarginati». (Poi gli abbiamo
dimostrato quanto si sbagliava!). Anche lo stesso Raymond Locatelli è stato
considerato da alcuni italiani come un traditore, passato dalla parte della
borghesia, abitante del villaggio. Dall’altra parte resistevano ancora i
pregiudizi da parte di molti vecchi abitanti del paese nei confronti degli
italiani.
Ecco gli ostacoli alle buone relazioni e all’integrazione. Ma se ci
fossimo fermati lì, l’immigrazione italiana avrebbe finito per essere, come gli
africani oggi, un grave problema sociale. Tuttavia, la popolazione di origine
italiana, nonostante le difficoltà iniziali, ha finito per essere assorbita
fino a divenire invisibile dentro la società francese. Così, le ultime
associazioni di italiani, un tempo numerose,
sono quasi scomparse (ma non il nostro gemellaggio!). Come si è fatto? Il modo
più semplice, credo, è stato che gli immigrati italiani hanno capito che i loro
discendenti avrebbero passato la loro vita in Francia e che non sarebbero più
tornati nel loro paese. Un segno che non manca mai: hanno smesso di parlare
italiano ai loro figli, pensando che sarebbe stato un handicap per loro, alcuni
hanno addirittura tolto la lettera finale al loro nome in modo che suonasse
come francese.
Si deve riconoscere che vi erano
alcuni fattori che promossero l’integrazione: la stessa religione e la stessa chiesa,
l’unica del paese. E poi gli italiani non sono venuti in Francia che solo con
la forza delle loro braccia. Essendo altamente politicizzati, hanno dapprima
svolto un ruolo importante nelle lotte sindacali, insieme a tutti i lavoratori,
spesso come leader. E dovete sapere che in molte città essi furono all’origine
della creazione di cori, bande, orchestre e squadre di calcio. Oggi, nessuno in
Francia immagina di fare battute xenofobe sugli italiani. Ora vi sono altri immigrati di cui alcuni francesi (non
necessariamente “nativi” essi stessi) hanno paura che ci “colonizzino”. Ma
questo caso è molto più grave perché, per ora, non se ne vede la soluzione. Per
saperne di più sulla emigrazione italiana, leggete questo: http://cahiersdugretha.u-bordeaux4.fr/2010/2010-13.pdf
Mai articolo fu più azzeccato in questo periodo!
RispondiEliminaArticolo attualissimo, della serie "quando gli immigrati eravamo noi". A qualcuno farebbe proprio bene leggerlo. Grazie Richard per questo bellissimo pezzo!
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